L comme Laboureur



Nous avons tous dans nos généalogies, au moins un laboureur. Aujourd’hui nous dirions agriculteur, cultivateur, mais sous l’ancien régime qui est-il ?

Il représente l’ensemble des paysans. Sous l’ancien régime, cette catégorie représente 80% des 20 millions d’habitants de la France. Ces 16 millions de français vivent et travaillent dans les champs, dès leur plus jeune âge. Plus il y a de main-d’œuvre familiale plus la possibilité d’avoir du travail ailleurs que dans la ferme est bien venue. Les revenus sont plus importants.

Ils peuvent être propriétaires de leur terres, mais n’arrivent pas toujours à en vivre car les propriétés sont petites. Chacun possède en moyen, un hectare, un hectare ½. Ce sont alors des laboureurs. Les autres sont manouvriers, brassiers, journaliers, ménagers, bordagers et travaillent pour d’autres.

Laboureur ce n’est pas un métier ou une profession, comme on l’entendrait de nos jours, mais un statut social, qui au départ dépendait effectivement de la détention du labour, « celui qui possède l’instrument aratoire », mais, qui par la suite dénommait un paysan aisé, par rapport à ceux qui l’entouraient. Cependant, selon les régions, les niveaux de vie des uns et des autres pouvaient revêtir des réalités bien différentes.

Une seule pensée le hante : épargner et acheter de nouvelles terres pour s’agrandir. Toutefois, les impôts ne lui facilitent pas la tâche. Il lui faut souvent vendre du bétail pour les payer. Parfois, comme cela ne suffit pas à faire vivre sa famille, il exerce un autre métier. Sur Sarzeau, j’ai vu des laboureurs-saulnier, des laboureurs-marin. Ailleurs ils peuvent aussi être aubergiste, maçon, charretier…

Il lui fallait préparer la terre. Parfois, tout d’abord défricher, en arrachant les arbres, les broussailles, les racines, les pierres qui pouvaient encombrer le terrain. Il lui fallait encore creuser des fossés en situation basse pour l’écoulement des eaux et éviter l’inondation des champs en cas de fortes pluies.


Le labourage n’avait lieu qu’une fois le sol libéré et propre. Il se faisait avec des bœufs, des ânes, des mulets, un ou plusieurs chevaux si le paysan avait une plus grande aisance financière, et une charrue avec son soc versoir pour bien retourner la terre. Il lui faut aussi une herse, une charrette, des faux. Cela requière donc une petite fortune. Il labourait aussi pour des voisins moins fortunés qui lui louaient ensuite leurs bras pour la récolte. Il loue parfois aussi des terres à des nobles dans des baux de généralement 9 ans, pour accroitre ses ressources. Il emploie alors de la main d’œuvre, des domestiques, des journaliers à qui il permet de subsister.


Une fois la terre labourée, il faut encore la fumer, soit avec les déjections des animaux de la ferme, les vaches, les cochons, ou au bord de la mer avec le goémon. Puis il faut semer, sarcler, moissonner et engranger les récoltes. Il est tributaire aussi des mauvaises récoltes, des insectes ravageurs, des aléas climatiques, trop de pluie, pas assez, le gel. S’il tombe malade ou meure, sa veuve peut se retrouver sans rien, avec des petits enfants à charge. Son seul salut, est de se remarier très vite avec un autre laboureur, ou un journalier courageux qui pourra reprendre la terre, faire vivre la famille et laisser un héritage.




Le Laboureur et ses enfants



Travaillez, prenez de la peine :
C’est le fonds qui manque le moins
3.
Un riche Laboureur, sentant sa mort prochaine,
Fit venir ses enfants, leur parla sans témoins.
Gardez-vous, leur dit-il, de vendre l’héritage
Que nous ont laissé nos parents.
Un trésor est caché dedans.
Je ne sais pas l’endroit ; mais un peu de courage
Vous le fera trouver, vous en viendrez à bout.
Remuez votre champ dès qu’on aura fait l’Aout
4.
Creusez, fouillez, bêchez ; ne laissez nulle place
Où la main ne passe et repasse.
Le père mort, les fils vous retournent le champ
Deçà, delà, partout ; si bien qu’au bout de l’an
5
Il en rapporta davantage.
D’argent, point de caché. Mais le père fut sage
De leur montrer avant sa mort
Que le travail est un trésor.

— Jean de La FontaineFables de La Fontaine,

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